Lors de sa conférence pour les 20 ans de Compilatio, Isabelle Filliozat, psychothérapeute et experte en intelligence émotionnelle, a abordé les effets de l'intelligence artificielle (IA) sur l'apprentissage des étudiants, et comment elle peut à la fois stimuler ou inhiber le cerveau humain. Selon elle, si l'IA est utilisée uniquement pour remplacer la réflexion humaine, elle pourrait rendre notre cerveau paresseux. Cependant, utilisée de manière judicieuse, elle peut aussi devenir un outil puissant de soutien cognitif et augmenter notre capacité de réflexion.

Isabelle Filliozat et l'intelligence émotionnelle

Isabelle Filliozat : experte en intelligence émotionnelle et parentalité

Isabelle Filliozat est une psychothérapeute, conférencière et formatrice reconnue, spécialiste en intelligence émotionnelle, confiance en soi, et en accompagnement du développement des enfants et des adolescents. Auteur de plus de 50 ouvrages, traduits dans plusieurs langues, elle est une figure majeure de la parentalité positive en France. Depuis plus de 40 ans, elle transmet son expertise à travers des conférences et des formations, offrant des clés pratiques pour comprendre les émotions et favoriser un apprentissage émotionnellement intelligent. Son approche repose sur l'idée que la compréhension des émotions et leur gestion sont essentielles pour le bien-être et la réussite, tant dans la vie personnelle que dans le cadre éducatif.

Apprentissage avec l'IA

Devenir co-créateurs avec l'IA : réinventer l'apprentissage

Isabelle Filliozat a souligné qu'il ne faut pas interdire l'usage des IA telles que ChatGPT, mais plutôt l'encourager de manière contrôlée pour que les étudiants apprennent à l'utiliser de manière critique. Plutôt que de laisser l'IA prendre des décisions à leur place, les étudiants doivent apprendre à dialoguer avec l'IA, à lui poser des questions pertinentes et à remettre en question ses réponses. En Finlande, par exemple, les enfants dès 6 ans sont formés à différencier la pensée humaine de celle de l'IA et à détecter la désinformation. Cette approche pédagogique permet de développer la pensée critique et de préparer les jeunes à interagir de manière éclairée avec les outils numériques.

Utilisation de l'IA dans l'éducation

Le rôle de l'enseignant : renforcer la motivation et la confiance

Un point majeur de la conférence a été la motivation intrinsèque. Isabelle Filliozat a insisté sur le fait que les étudiants apprennent mieux lorsqu'ils se sentent en sécurité émotionnelle avec leur enseignant. La relation enseignant-étudiant est donc essentielle pour stimuler l'engagement. Elle a également précisé que l'IA pourrait prendre le rôle de cette sécurité relationnelle, car elle est perçue comme non-jugeante et toujours disponible. Cependant, cela ne doit pas empêcher les enseignants de maintenir un lien humain fort avec leurs élèves, pour qu'ils se sentent motivés à apprendre.

Réflexion active des étudiants - détection ia

Valoriser le processus de réflexion plutôt que le résultat

Un autre aspect clé abordé par Isabelle Filliozat est l’importance de valoriser le processus de réflexion plutôt que de se concentrer uniquement sur les résultats. Elle a cité des études montrant que, dans l'éducation actuelle, l'évaluation se concentre trop sur les résultats, souvent au détriment de la réflexion qui les a menés. Elle a encouragé les enseignants à donner la parole à ceux qui n’ont pas encore trouvé la réponse, pour mieux comprendre leur processus de pensée. En valorisant l’erreur et la réflexion, les étudiants peuvent développer une pensée plus critique et autonome, essentielle dans un monde où l'IA occupe de plus en plus de place.

Pensée critique et IA

L’IA comme outil d’apprentissage, mais pas de remplacement

Pour Isabelle Filliozat, l'IA ne doit pas être perçue comme une solution pour déléguer la pensée, mais plutôt comme un moyen de compléter et augmenter les capacités humaines. En demandant à l’IA de remettre en question ses propres réponses, de comparer des idées et de proposer des pensées contradictoires, les étudiants peuvent stimuler leur réflexion et aller au-delà des réponses simplistes. Toutefois, un point d'attention demeure : l'IA apprend des données les plus répandues, et les biais peuvent se propager à travers ses réponses. D'où l'importance de former les étudiants à l’utilisation critique de l’IA, afin qu'ils comprennent ses limitations et les dangers de l’over-reliance.

Intelligence émotionnelle dans l’éducation

Exercice pratique pour tester l'IA et l'engagement des étudiants

Isabelle a également proposé une mission intéressante pour les étudiants : étudier les grands scandales liés à l'IA, comme les erreurs commises par des IA utilisées dans le domaine juridique ou médical. Cela permettrait de mettre en lumière les risques de la surévaluation de l'IA et de comprendre ses limitations. En intégrant ces sujets dans le programme, les étudiants pourraient développer une approche plus critique et responsable envers l'IA, tout en renforçant leur capacité à penser par eux-mêmes.

Conclusion : l'IA comme catalyseur de réflexion, mais pas un substitut à la pensée humaine

Isabelle Filliozat nous invite à considérer l'IA comme un outil d'augmentation cognitive, capable de soutenir le processus de réflexion, mais non de remplacer l’acte de penser. En encourageant les étudiants à utiliser l'IA de manière critique et réfléchie, en valorisant le processus de réflexion et non seulement les résultats, nous ouvrons la voie à un apprentissage plus actif et plus autonome. L'objectif est de maintenir l'humain au cœur de l'éducation, même à l’ère des technologies avancées. Par son approche, Isabelle nous rappelle l'importance de cultiver la pensée critique et de réinventer l'éducation pour qu’elle reste véritablement humaine et stimulante, dans un monde où l'IA occupe une place croissante.

Photo de Élodie BRESSE

Élodie BRESSE

Convaincue que l’intégrité construit la réussite, je développe des contenus pour aider les étudiants et les enseignants dans leurs usages numériques.